DEPAYS7 STACK009

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  • Id : 1139
  • Catégorie : PHOTO
  • Séquence : Depays7
  • Card : DEPAYS7 STACK009

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Texte :

Quand on est capable de cette violence-là (et les nations
occupées par le Japon pendant la Seconde Guerre Mondiale en
savent quelque chose) et qu'on a également reçu le don d'appri-
voiser toute chose avec son contraire, il n'est pas impensable que
s'établisse un très étrange et peut-être précaire équilibre entre
une réalité policée et un imaginaire sanguinolent. Cela s'est vu ailleurs,
et après tout la catharsis n'est pas brevetée chez Sony. Ce qui est
plus troublant au Japon, c'est qu'on a l'impression que l'imaginaire
règle ses comptes avec lui-même, que lui aussi est double et
que finalement il ne s'agit pas d'exorciser la violence du monde
par le spectacle du rêve, mais de livrer dans l'espace du rêve un
combat, le spectacle d'un combat dont l'enjeu est précisément le
monde. Quand je vois à la télévision les héros des chambaras, les
feuilletons de samourais, je les vois "navrés" à la fois dans le sens
ancien et moderne du mot, c'est-à-dire trucidés (c'est souvent ce
qui leur arrive) et désolés de ne rien trouver d'autre. Comme si les
Japonais naissaient navrés, sachant tout sur la violence, sur le monde
et sur la mort, n'ayant qu'une vie pour s'excuser de tant d'imper-
fections, prompts à s'émerveiller devant tout ce qui retarde, fût-ce
d'une seconde, I'inévitable catastrophe (un corbeau qui passe, un
criquet qui crie, une montre à hibou, la rousseur d'une plante),
épouvantés devant l'abîme, résignés pendant la chute. La scène
finale du chambara, c'est le moment où, tout ayant échoué,
I'intelligence, la ruse, le bon sens et l'intrigue, il ne reste plus qu'à
se jeter sur l'adversaire, navré d'en arriver là, navré que la vie ne soit
qu'une éternelle chute, le sabre en avant, dans une immense flaque
de sang, avec sur le visage et dans le regard tous les signes d'une
terrible, dérisoire et nécessaire pitié.