Avant de quitter Cuba, oncle Anton devait encore épingler dans son album quelques images
des événements de 1933, qui virent la première apparition du sergent Batista (bien renseignée,
l’Ambassade le soupçonnait d’être communiste), futur général, futur dictateur. Des émeutiers
en bras de chemise et canotier dans les rues, des fusillades autour de l’Hôtel Nacional, où
un jour j’aurais une chambre, Cespedes, le président intérimaire, se réfugiant à l’Ambassade,
puis plus tard le colonel Cespedes, blessé pendant les combats ("ils s’appellent donc tous
Cespedes" disait l’ambassadrice), arrivant sur ses béquilles. Les histoires de millions emportés
par Machado, laissant le pays ruiné, les manoeuvres de l’envoyé américain Sumner Welles,
des tas de combinaisons assez obscures pour ma cervelle de douze ans, mais qui allaient me
laisser une impression assez forte de la politique cubaine pour que la victoire castriste de
1959 me soit d’avance une bonne nouvelle …