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  • Id : 903
  • Catégorie : PHOTO
  • Séquence : Coréennes_9muses
  • Card : 9muses stack011

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Texte :

Le poids du passé, enforcé par ces tombes innombrables, ces tortues chargées des bornes kilométriques
du temps qui avancent imperceptiblement à travers la campagne, tête levée... Est-il possible de le réduire
au seul rôle d'ornement, comme le nôtre, de tracer entre les statues et les hommes une frontière assez
sûre pour que nul vertige ne la traverse, nulle parole de démesure, de déraison, de destruction ?

Pour quelque temps encore, deux Corées sont face à face. La question se pose partout, sauf là où la
culture est définitivement affaire de musée. Ce qui se perdra, ce qui ne se perdra pas, ce qui changera
de peau, ces formes menacées de n'être plus que des formes, ces forces menacées de demeurer des
forces, tous ces courants ennemis : la construction qui ment et la vérité qui détruit, la libre contrainte
et le libre désespoir, I'hymne à la joie et le chant profond —  on ne peut guère qu'en écouter en soi les
émissions réciproquement brouillées, en attendant que la bigamie de l'esprit soit condamnée par la loi.
Tout en se gardant d'oublier — et si on l'oubliait, le légendaire coréen serait là pour le dire à sa manière
— qu'il arrive un moment où la vie de l'homme se paye par la mort de ses dieux.

Un bûcheron avait protégé un faisan, qu'un serpent menaçait. Changé en fille, le serpent réussit à
emmener le bûcheron dans une tour, et là — bouclé. Le bûcheron invoquant la protection des dieux,
la fille-serpent accepta d'attendre jusqu'au matin : si le bûcheron était capable d'obtenir des dieux
qu'ils sonnassent la cloche d'un temple situé à des kilomètres, elle lui laisserait la vie sauve. La veillée
commença, le bûcheron à l'agonie, le serpent attentif. Et vers le milieu de la nuit, la cloche du temple
sonna lourdement. Epouvanté, le serpent s'enfuit, et la tour disparut en fumée. Lorsque le bûcheron,
après des heures de marche, parvint au temple pour remercier les dieux, il vit sur la cloche une trace
de sang toute fraîche, et par terre, le corps fracassé d'un faisan.