outre les indispensables formules d'excuses et de remerciements,
les différentes combinaisons du mot neko, et de chaque étape tu
gardes le souvenir du commerçant qui a quitté sa boutique pour
te conduire au pied de l'immeuble que tu cherchais, de la gardienne
du cimetière des chats (neko dera) à Osaka qui t'a escorté pendant
vingt minutes, absolument pas découragée par le caractère limité
de ton vocabulaire et te comblant de confidences, pour te laisser
sur une grande artère pourvue en autobus (ce qui veut dire aussi,
bien sûr, que toi, stupide étranger, tu n'aurais pas été capable de la
trouver tout seul - mais comme la condescendance courtoise est
plus plaisante que l'égalité hargneuse...). Ce commerce prend aussi
des formes plus étranges. Dans un de ces charmants petits trains
d'Hokkaido, bois sombre et velours vert, qui auraient plu à Larbaud,
tu guignes le magazine que lit ta voisine parce que tu y as entrevu
un article illustré sur les takenoko, les petits danseurs du dimanche
dans le parc de Yoyogi, et qu'il t'a semblé reconnaître une des
fillettes que tu avais toi-même photogtaphiées. Sans avoir en rien
exprimé ton intention, tu formes dans ta tête le projet de lui
emprunter poliment le magazine quand elle sera au bout de sa
lecture. Sur quoi, toujours lisant, elle s'assoupit. J'attendrai son
réveil, penses-tu. Le réveil a lieu quelques minutes plus tard et
immédiatement elle te tend le magazine. Bien reçu. L'harmonie a
encore frappé.
Takenoko